Ecrire un premier roman : Claudine à l’école

01/12/2013

Terminer l’écriture d’un premier roman est en soi une petite victoire. On a découvert les pièges de la construction, les aléas de l’inspiration, les chausse-trapes du style et les crises de confiance. Qui dira les heures passées sur une ligne, une phrase, un paragraphe ?…  Alice et les mots a  recueilli les impressions de quelques talents prometteurs à l’issue de leur première expérience romanesque. Aujourd’hui :  Colette Willy, qui s’apprête à publier « Claudine à l’école » aux éditions Paul Ollendorf. Nous sommes en 1900*.

Colette

Il y a longtemps que vous écrivez ? Qu’est-ce qui vous a donné l’envie d’écrire ce premier roman?

Ecrire, ce n’était pas mon idée… A l’école, j’avais de bonnes notes en rédaction, mais de là à  écrire un roman ! Croyez-moi, je n’y avais jamais pensé. C’est mon mari qui m’a poussée. En découvrant un carnet où j’avais noté quelques souvenirs d’école, il a trouvé que j’avais une bonne plume et m’a mise au défi d’en faire un roman. Vous avez un nom pour cela aujourd’hui : autofiction, je crois ?

Comment écrivez-vous : feuilles volantes, cahier, carnet…  ? Avez-vous des rituels d’écriture ?

J’écris sur des cahiers semblables à mes cahiers d’école. Vous savez, ces cahiers à  feuillets vergés, rayés de gris, à barre marginale rouge, à dos de toile noire, avec une couverture à médaillon : LE CALLIGRAPHE. Quant aux rituels, ma foi… je me tiens sur un bout de bureau, la fenêtre derrière moi. Et la porte fermée. Ah oui ! je garde aussi à portée de main quelques oignons crus que j’aime bien croquer en écrivant, ça me redonne de l’énergie. Et c’est bon pour le teint !

Quel est votre rythme d’écriture ? Combien d’heures par jour/ par semaine ?

J’écris tous les jours ! Ne le dites à personne, mais mon mari, Monsieur Willy, ne me laisse sortir que lorsque j’ai fait mon quota de lignes. « La règle, la règle, la règle ! » me répète-t-il. « Il n’y a que ça. » Il s’y connaît, il est journaliste. Critique musical. Au début, je renâclais un peu… mais le résultat est là : j’ai écrit un roman. 

Comment faites-vous les jours « sans » ? Quels sont vos « trucs »  ?

Pour avoir le droit de sortir, je dois montrer patte blanche… c’est-à-dire  pages noircies. J’ai  donc intérêt à produire, n’est-ce pas ! Des trucs ? Vous en connaissez, vous, des trucs ? Moi pas. Quand ça ne vient pas je rêvasse, je crayonne dans les marges, je tourne autour d’un mot, je lui dessine des pattes, des antennes, je louche sur la page jusqu’à ce que, de fil en aiguille… l’écriture revienne. Il le faut, de toute façon, car je mets un point d’honneur à rendre ma copie. 

Avez-vous des thèmes de prédilection ?

Je ne sais pas, moi… Disons : vivre. 

Dites-nous quelques mots au sujet de votre personnage.

Claudine a quinze ans. C’est une jeune fille indépendante, décidée et, j’ai le regret de le dire, assez désobéissante. Elle tyrannise ses camarades et en fait voir de toutes les couleurs à sa directrice, Mademoiselle Sergent. L’histoire se passe l’année du brevet, mais ce n’est pas le plus important.

Quelles sont les principales contraintes auxquelles vous avez dû vous confronter en écrivant ce premier roman ?

La pire contrainte, pour moi : être enfermée jour après jour ! Ensuite, je l’ai déjà dit, être obligée d’inventer. Pour faire un roman avec mes souvenirs, j’ai dû en rajouter… enjoliver… Moi, je pense que pour écrire il faut savoir regarder et non inventer.  La vie est tellement plus intéressante. 

Avez-vous un/des lecteur(s) privilégié(s) ? Avez-vous fait relire votre roman à des personnes de votre entourage avant de le soumettre aux éditeurs ?

Mon mari. C’est un lecteur redoutable et un excellent critique. 

Quels sont vos projets à présent que ce premier roman est bouclé ?

Sortir prendre l’air ! Faire un tour à bicyclette et aller boire un chocolat chez Ladurée. Et surtout ne plus jamais m’asseoir à une table pour écrire. Je serais soulagée si ce roman passait à la trappe. Sinon, je devrais écrire une suite, quelle barbe…

* Cette interview imaginaire s’inspire de faits réels et des écrits de Colette, en particulier Mes apprentissages, livre de souvenirs paru presque quarante ans après la publication de « Claudine à l’école ». En vérité, à l’époque de leur parution, les « Claudine » ont été publiés sous la seule signature de Willy.

2 Commentaires

  1. Viano

    Jolie, cette interview! Colette a-t-elle vraiment dit « pour écrire il faut voir et non inventer »?

    Réponse
    • Alice et les mots

      J’ai remplacé « voir » par « savoir regarder » qui est plus exact. C’est ainsi que Colette concevait l’écriture : porter un regard sur le monde.… (même si j’ai pris certaine liberté pour l’exprimer ici).

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